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Disparition troublante de Yifat Tomer-Yerushalmi : la procureure qui en savait trop ?

Entre scandale de fuite et crime d’État, Israël s’interroge sur le vrai visage de sa justice militaire.

LePointTN-Sofien Rejeb

La disparition de la procureure militaire israélienne Yifat Tomer-Yerushalmi, retrouvée vivante après plusieurs heures d’inquiétude, a révélé un scandale à plusieurs niveaux : une vidéo accablante montrant des soldats israéliens agressant un prisonnier palestinien, des soupçons de dissimulation au sein de l’armée, et une justice militaire en crise de crédibilité.

Une lettre d’adieu et un silence inquiétant

Dimanche matin, sa voiture a été retrouvée abandonnée face à la mer, contenant une lettre d’adieu. Quelques heures plus tard, la juriste la plus puissante de l’appareil militaire israélien était placée en garde à vue, soupçonnée d’avoir entravé une enquête et transmis une vidéo classifiée à des journalistes.

Ce geste dramatique intervient deux jours après sa démission officielle, sur fond de pressions internes et de critiques virulentes de la droite israélienne, qui l’accuse d’avoir « trahi » l’armée.

Une vidéo insoutenable

La vidéo en question, tournée en août 2024 dans le centre de détention de Sde Teyman, montre plusieurs soldats entourant un détenu palestinien avant de le frapper et de l’agresser sexuellement.

Diffusées récemment par la chaîne Channel 12, les images ont provoqué un choc en Israël comme à l’étranger. Le prisonnier, gravement blessé, a dû être hospitalisé avec des fractures multiples et des lésions internes.

« Le véritable scandale n’est pas la fuite, mais ce qu’elle révèle », dénonce un avocat israélien des droits humains sous couvert d’anonymat.

« Ces violences ne sont pas des cas isolés, elles traduisent un système d’impunité. »

Le dilemme moral et politique

Les autorités militaires ont immédiatement ouvert une enquête pour identifier l’origine de la fuite, accusant Tomer-Yerushalmi d’avoir voulu « porter atteinte à la réputation de l’armée ».

Mais pour ses défenseurs, la procureure n’a fait qu’agir en conscience : dénoncer une dissimulation organisée.

Ce paradoxe révèle toute la fragilité du système israélien : une institution judiciaire censée défendre le droit, mais qui se retourne contre ceux qui tentent de l’appliquer avec intégrité.

Une société israélienne fracturée

L’affaire Tomer-Yerushalmi illustre le clivage croissant entre la raison d’État et la justice morale.

Pour les milieux sécuritaires et nationalistes, la priorité reste la protection des soldats. Pour les ONG et la gauche israélienne, il s’agit au contraire d’une question d’éthique et de responsabilité.

La tension est telle que certains analystes parlent d’un « tournant MeToo militaire », où la culture du silence cède peu à peu la place à la dénonciation des abus.

Les répercussions internationales

Ce scandale survient au moment où Israël fait déjà face à des accusations de crimes de guerre à Gaza. La vidéo, diffusée en plein débat sur le respect du droit international humanitaire, pourrait relancer les appels à des poursuites devant la Cour pénale internationale.

L’arrestation d’une haute magistrate pour avoir diffusé une preuve de torture risque d’accentuer la méfiance des partenaires occidentaux quant à la transparence du système judiciaire israélien.

Entre la fuite d’un document confidentiel et la révélation d’un crime d’État, le choix moral semble clair.

Mais en Israël, où la guerre et la sécurité priment souvent sur la justice, ceux qui montrent la vérité paient parfois le prix le plus lourd.

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